jeudi 7 décembre 2006

Se pourrait-il que le voyageur soit une femme ?


L'autre soir, j'ai vu un joli téléfilm dont je découvre - ce qui dévoile mon ignorance! - qu'il s'agit d'une adaptation d'une pièce de Jean Anouihl: Le voyageur sans bagage. Un amnésique de la Grande Guerre cultive tranquillement son jardin dans un asile lorsque des familles s'intéressent à lui ... pour combler leur dette! L'une d'elle, notamment, est plus vraisemblablement la sienne, mais notre homme ne supporte pas l'idée d'avoir à endosser la personnalité d'un être aussi dépravé que celle du frère disparu dont on lui renvoie l'image. De merveilleux dialogues s'ensuivent tous plus savoureux les uns que les autres! Finalement, lorsque le filet se ressère de trop notre ami décide d'épouser la personnalité d'un ... Je vous laisse découvrir.


Si j'amène ce film en discussion, c'est parce que tout en le rergardant ne cessaient de remonter en moi des bribes d'une discussion que j'ai eu il y a de cela une quinzaine avec un ami. Nous parlions de la rencontre des évèques à Lourdes en novembre et du fait qu'y avait été discutées "les différences structurantes de la vie sociale", travaux d'experts à l'appui avec, notamment, l'intervention de Jacques Arenes. Dans les milieux ecclésiastiques, la thérorie du genre (Gender theory) est souvent nommée "idéologie du genre". Ce qui a mon sens va trop loin et est une manière de ne pas entendre la question que pose cette théorie. Ce film, Le voyageur sans bagage, rejoint la discussion en ce qu'il aborde la question de la mémoire bien sûr mais aussi, à mon sens, celle de notre liberté à être celui ou celle que nous voulons être.


Il introduit, en effet, un "coin" dans l'unité trop évidente de la personnalité en posant la question: que ce passe-t-il pour celui qui ne se souvient de rien? Cela me rappelle aussi un roman lu en hébreu sur le leader d'un groupe un peu illuminé de jeunes pratiquants qui avait comme stratégie inconsciente d'oublier régulièrement ce qu'il avait fait à différentes étapes de sa vie. Souvent des personnes qui ont vécu un traumatisme n'oublient-elles pas ce qu'elles ont vécu.




Il y a un très beau témoignages en ce sens dans le livre Nazisme, science et médecine qui vient de paraître chez Glyphe. Un jeune imfirmier juif de l'armée française est chargé à la libération de Strasbourg d'aider ceux qui enquêtent sur les corps retrouvés dans la faculté de médecine, il écrit son émotion à sa fiancée, puis oubliera pendant 40 ans, jusqu'à ce qu'un jour montent les souvenirs...




Bref, ce film, cette question du rôle de la mémoire dans ce continuum psychologique qui nous constitue, a rouvert pour moi la question du genre - je me sens homme, je me sens femme... qu'est-ce à dire ?



Personnellement, je prends la théorie des genres comme quelque chose de beaucoup plus doux que l'opinion généralement reçue dans l'Eglise, selon laquelle il s'agirait d'une idéologie à prétention que tout un chacun nous sommes libres de nous faire homme ou femme selon notre désir. Mais qualifiant cette théorie d'idéologie entend-on la question? Il me semble que la Gender theory cherche plus simplement à reconnaître que dès l'enfance nous apprenons "culturellement" - et d'abord par l'apprentissage du langage - que nous sommes homme ou femme, et donc le masculin, le féminin... et à en évaluer les conséquensces. Cela ne se fait pas dans toutes les sociétés de la même manière. Je citais à mon ami le fait qu'en hébreu, à la différence du français, c'est dès le berceau que l'on s'adresse à vous différemment si vous êtes un garçon ou une fille - "at, ata", à la différence du "tu" indiférencié du français ou du "you" anglais. Cela a-t-il une importance? Quelle est-elle?

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