vendredi 2 mai 2008

De l'Ascension à la mémoire de la Shoah

Hier premier mai, c'était la fête du travail bien sûr mais aussi l'Ascension et, en Israël cette année, le jour dédié à la mémoire de la Shoah et de la Gvura, c'est à dire de ces héros connus ou anonymes qui se sont révoltés et n'ont pas accepté le sort imposé. Ce sont les hasards du calendrier qui ont fait se correspondre ces deux commémorations. Cela a orienté ma méditation.
Jean Dujardin dit quelque part que le Samedi Saint définit la seule attitude juste des chrétiens devant la Shoah. Dans la suite du Samedi Saint, cela fait des années que je médite sur l'Ascension. Le Samedi Saint, ce jour du tombeau, où Dieu semble s'absenter de l'Histoire, l'Ascension, où les disciples font l'expérience de ce que nous appellerions la "nuit des sens". Là, demeure le commandement du Shabbat et de sa joie - "et durant le Shabbat, elles observèrent le repos prescrit", nous dit-on des femmes venues embaumées le corps de Jésus dans l'Evangile de Luc (23, 56). Ici, le commandement est "Demeurez à Jérusalem" (Ac. 1, 4) et ouvre une attente de neuf jours jusqu'à la Pentecôte, jusqu'à la naissance du Peuple nouveau.
Bien sûr, je ne pouvais pendant la messe faire abstraction du livre de Jean Le Bitoux, Les oubliés de la mémoire, que je viens de terminer et qui m'habite. Ce qui me frappe le plus, c'est l'honneteté de l'auteur qui reconnaît la quasi absence de solidarité entre homos dans les camps nazis, à la différence d'autres catégories d'internés. En fait, il situe le début d'un lien social entre homos à la fin de la 2ème Guerre Mondiale lorsque l'armée américaine, après la rédition du Japon, va "purger" ses troupes des homos enrôlés quelques années auparavant en vue de l'entrée en guerre. L'Armée américaine débarque ces soldats dans les ports de San Francisco et Los Angeles pour les marines et à Denver et Chicago pour les G.I.s, avec pour tout sou vaillant, la rumeur qui les précède dans leur village d'origine leur interdisant tout retour, alors devant la précarité naît une solidarité ...
Assistons-nous à la naissance d'un peuple ? Cette question me taraude depuis longtemps. Un peuple peut-il être constitué sur une préférence sexuelle ? Et pourtant c'est bien un sentiment d'appartenance que je ressens aujourd'hui, non exclusive d'autres appartenance, certes, mais fondamentale. J'ai quelques amis qui me disent se définirent comme "Je suis Juif, merci Hitler". Ma prise de conscience d'appartenir à un peuple, fusse-t-il de l'ombre, donne-t-il sens au sacrifice des victimes de ces persécutions ? Ces moments où Dieu semble se retirer de l'Histoire nous sont-ils donnés pour grandir en humanité ?

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