mercredi 6 septembre 2006

L'Immeuble Yacoubian

Une recension élogieuse, la description comme une fresque de l'intérieur de la société égyptienne et la référence à l'homosexualité, il n'en fallait pas plus pour que, moi qui vit depuis vingt ans immergé dans la société israélienne, je sois attiré par ce roman. On se demande toujours comment tout cela est vécu de l'autre côté. Je veux dire aussi bien l'extrémisme religieux que la condition homosexuelle. Un peu lent à démarrer, on est vite pris par l'ensemble des habitants de cet immeuble, vestige d'un passé que la révolution nassérienne a rendu révolu. C'est peut-être ce qui m'a le plus touché. Cette manière qu'à la litérature de faire toucher du doigt une histoire dont on sait finalement peu de chose. La présence massive des européens jusque dans les années 1950, leur départ, l'émergence d'un régime autoritaire fort qui laisse peu de place pour le brassage des populations et une vie culturelle ouverte sur l'Occident. Telle est la nostalgie de l'un des protagonistes du récit.

En même temps, on est en 1991, durant la guerre du Golfe et l'on voit se développer comme de l'intérieur le discours islamiste qui entraîne quelque jeune déçu des classes populaires vers le djihad. Les personnages sont bien plantés, presque trop bien. Ainsi ce jeune islamiste qui le serait devenu simplement suite au caractère obtus du régime et au manque de souplesse du système qui ne lui ont pas permis à lui, le fils du concièrge d'entrer dans la police. Le roman ne fait pas 350 pages mais 350 de plus n'aurait pas nuit à l'oeuvre, à mon sens.

Eh le personnage homo dans tout cela ? Eh bien c'est un peu pareil. D'un côté c'est un peu cliché. Sodomisé "de façon heureuse" étant enfant par le serviteur de la maison, Hatem poursuit sa vie d'adulte comme journaliste brillant et va finir agressé par son amant. C'est dans un sens un peu cliché. Son homosexualité est expliquée, même si elle n'est pas jugée, forcément douloureuse et dramatique. En même temps, que dire, c'est aussi la vérité d'une certaine société traditionnelle et le roman a le mérite de le montrer: le poids de la religion, la double vie et l'horizon affectif bouché. L'auteur a eu la bonne idée, à mon sens, de placer côte à côte divers couples reflétant divers aspects du même problème de la sexualité dans une société à la fois traditionelle et terriblement urbaine. C'est cette sociologie culturelle qui passionne car encore une fois elle permet de toucher du doigt un monde dont on ignore bien souvent le vécu.

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