mardi 17 mai 2005

Nature, contre nature et autres non naturels...

Dans nombre de discussions sur l'homosexualité, notamment chez les catholiques, revient l'affirmation que ce serait là une chose contre nature, pour ne pas dire un péché, un crime contre nature. Plus agaçant encore, l'exemple donné qu'il suffirait de regarder comment sont faits un homme et une femme pour comprendre... Or il me semble que l'on ne sait plus très bien ce que les érudits scholastiques de l'époque de Thomas d'Aquin voulaient dire par là et que l'on en donne une interprétation biologique erronée. Je m'explique.
Nature, contre nature et non naturels sont trois catégories médicales qui se rattachent à la tradition hippocratico-galénique qui a prévalu en Occident depuis l'Antiquité jusqu'aux abords de l'ère moderne et qui perdure de nos jours dans nombre de courrants de médecine dite naturelle, précisément. De quoi s'agit-il?
Pour Hippocrate et Galien, tout ce qui a trait à la physiologie - les os, les organes, les humeurs, etc. - font partie de la nature de l'homme. La santé apparaissant comme le juste équilibre entre ces choses. Ce qui est contre nature, c'est ce qui vient déséquilibrer ce bel équilibre. Ce sont donc les maladies, tout simplement. Quant aux mystérieuses choses non naturelles, et bien ce sont les éléments que je puis utiliser pour restaurer l'équilibre de la santé, c'est-à-dire les médicaments bien sûr, mais aussi six couples de contraire comme le repos et le mouvement, l'alimentation et la déplétion, les émotions heureuses ou tristes, etc. Notez que l'activité sexuelle fait partie de ces "non naturels" thérapeutiques! Donc lorsque les théologiens comme Thomas parlent de l'homosexualité (mais au fait de quoi parlaient-ils car le mot n'existait pas encore?), il me semble qu'ils voulaient simplement dire que pour eux il s'agissait d'une maladie et non pas d'une imcompatibilité d'organes... C'est sans doute un peu plus compliqué car chez eux la nature se rattachait à la finalité divine des choses ... il faudrait sans doute aller relire Boswell ou Mark Jordan pour voir ce qui était préconisé pour "traiter" ce déséquilibre, et l'on serait sans doute déconcerté...
Lorsque l'OMS retire de la liste des maladies mentales l'homosexualité, c'est bien une mise en cause de vielles catégories médicales, signe supplémentaire que de ce point de vue pour le meilleur et pour le pire nous sommes passé de la tradition galénique au paradigme scientifique, mais cela n'a pas grand chose à voir avec la forme de certains organes...
Ouwah, quelle humeur enseignante ce matin!

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Très utile rappel, surtout pour les catholiques. La morale officielle n'arrive pas à se dépêtrer de ces notions de "nature et contre-nature". Et notamment de cette farce selon laquelle il y a un 'plan de Dieu' pour tout et donc qu'il y a la bonne et la mauvaise manière de tout faire, tout, tout, tout, y compris la sexualité. Moi, je trouve que Dieu n'est pas comme IKEA: on n'a pas à lui demander un mode d'emploi pour chacune des choses que nous devons vivre.